Les recommandations de Nicole Robert

Yes Sir! Madame... - Robert Morin
Pendant plusieurs années Robert Morin tourne avec sa caméra vidéo, qu’il traîne dans sa poche, ce film, dans la spontanéité et le moment qui s’impose. Il se met en scène dans le rôle de Earl Tremblay, politicien, né d’un père francophone et d’une mère anglophone, en pleine crise d’identité. Il pose un regard acide, pertinent, satirique, sur notre société «bilingue». Une histoire au son, une histoire à l’image. Une phrase en français, une phrase en anglais. Complètement jouissif. Une dérision qui pourtant nous amènera à des propos existentialistes. Un incontournable de notre cinématographie. Robert Morin est un de nos plus grands cinéastes.

Polytechnique - Denis Villeneuve
Denis Villeneuve signe ici une grande œuvre. Un film puissant et émouvant, d’une beauté bouleversante. Avec beaucoup de respect, Denis Villeneuve ouvre le voile sur un événement terrifiant de notre histoire. Il pose un regard sans jugement sur notre société qui met au monde des monstres, un regard empreint de compassion sur les femmes et les hommes victimes de cette violence. Les acteurs sont criants de vérité. On sort de ce film profondément ébranlé. Un film encore malheureusement d’actualité.

Mommy - Xavier Dolan
Un film coup de cœur pour des millions de spectateurs d’ici et d’ailleurs. Il n’y a pas de mots pour décrire ce film, cette histoire de ce fils qui souffre de problèmes psychiatriques, de sa mère qui veut le garder mais qui n’y arrive pas et de leur voisine qui fait tout pour les aider. Il sera confié à une institution. Il voudra s’en échapper. C’est un film qu’on vit et qui nous pénètre jusqu’à la moëlle. La finale est déchirante. Brillamment interprétés par Olivier Pilon, Anne Dorval et Suzanne Clément. Brillamment mis en scène. Avec ce film, à 25 ans, Xavier Dolan s’inscrit au palmarès des grands et il le demeure.

Sin La Habana - Kaveh Nabatian
Kaveh nous raconte l’histoire de Leonardo, Cubain, qui veut devenir un grand danseur de ballet, et de son amoureuse Sara, aussi cubaine, qui veut devenir avocate. Cuba est trop petit pour l’accomplissement de leurs rêves. Ils doivent partir pour Montréal. Le mariage arrangé semble la solution. Leonardo rencontre Nasim, une Iranienne artiste du verre, qui sort d’une relation douloureuse. Elle tombera sous le charme de Leonardo qui la suivra à Montréal . Alors qu’on croit qu’on aura droit à l’histoire classique de l’exploitation de l’amour pour obtenir sa liberté, Kaveh nous montrera une tout autre réalité. On pénètrera dans le milieu iranien de Nasim, où le père est raciste; on vivra les difficultés de Leonardo pour trouver un emploi et pour réussir à trouver une troupe qui reconnaîtra le danseur de ballet qu’il est. On s’attachera avec Leonardo à Nasim. Et ce récit prendra toute sa force dans sa finale lorsque Leonardo réussira de passer du chat au tigre. Le tout sur des images éblouissantes, un Montréal sous le froid bleuté, La Havane sous la chaleur colorée, la danse dans toute sa beauté.

Noémie dit oui - Geneviève Albert
Un film coup de poing, dérangeant, parfois insoutenable. Geneviève nous livre ici un film nécessaire, un film que tous les adolescents devraient voir. Avec beaucoup de lucidité, et de tact, sans jamais tomber dans le voyeurisme, on vit la réalité du Grand Prix où la prostitution et l’exploitation de la jeune fille sont les faits de ce week-end, où une Noémie, jeune, fragile, qui croit en son prince charmant qui va la sauver de sa triste vie, va perdre son innocence, ses illusions, ses espoirs, et vivre l’enfer des clients qui passent dans sa chambre durant ces 3 jours interminables. 3 jours interminables pour elle et pour nous. Pourtant tous les personnages sont attachants. Le regard de Geneviève est humaniste, mais son constat est brutal. On vit son indignation. Elle nous rejoint de façon percutante.Un premier film d’une grande maturité. Kelly Depeault y est éblouissante.